J'ai découvert alors qu'en
parcourant ce lieu, l'œil rivé sur le verre dépoli de mon
Rolleicord, je me projetais dans le paysage. J'explorais
un espace mental et lui donnais forme en fixant sur le film
ces fragments d'un monde bien réel - la photographie en
est une trace - et pourtant imaginé.
L'aboutissement de ce projet,
c'est finalement la construction d'un univers intemporel,
non localisable, idée récurrente dans mes travaux. Peut-être
peut-on comprendre aussi l'acte photographique comme un
geste indissociable d'une expérience où la difficulté
consiste à se placer dans une position qui motive cet acte.
La photographie-trace témoigne d'un vécu ("j'ai vu cela
"). J'espère ainsi inviter le spectateur à partager
mon expérience, lui ouvrir la porte du rêve. Peut-être
se fera-t-il alors une autre idée du paysage et du pouvoir
qu'a la photographie, même "non manipulée", de
nous dérouter.
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